Treizième abbesse
Je ne saurais dire combien d’années l’abbaye de Chelles resta sous la commende du courtisan Haganon. Le Gallia Christiana aussi bien que les Annales de Mabillon nous laissent absolument sans renseignements sur ce point.
Après cette exploitation, l’abbaye dut être abandonnée et restée vacante, car Mathilde Ière, qui, sur le catalogue des abbesses, vient après Rothilde, ne serait entrée en fonction qu’en 1097, c’est-à-dire 175 ans après la prise de possession de l’abbaye par Haganon.
L’abbaye , comme beaucoup d’autres, devint le fief de seigneurs laïcs et l’on reverra une abbesse à Chelles, Mathilde 1ère , qu’en 1097.
Relisons, par exemple, ce que disait de cette époque le grand historien catholique Daniel Rops. Rappelant que nous entrons, en ce temps là, en période féodale avec tout ce que cela pouvait avoir d’injustices, après avoir indiqué qu’en fait les évêques étaient nommés par le souverain, il parle de la situation des monastères. « Pour les monastères la main mise séculière est désormais encore plus complète. L’habitude de prendre ou de donner un monastère comme véritable propriété est devenue courante. Hugues, par exemple, est abbé séculier de presque toutes les abbayes de ses domaines et c’est de cette charge abbatiale qu’il tire son surnom célèbre de Capet, porteur de chape. L’opération était même plus simple que pour un évêque où, du moins, le droit canonique exigeait que tout titulaire reçût la consécration épiscopale : pour les monastères rien de tel. On pouvait parfaitement être abbé, avoir la charge du gouvernement des moines et de la vie spirituelle, en étant un affreux soudard. »
Philippe le Hardi, par une charte de l’an 1281, constate que dans le cours du treizième siècle, l’abbaye de Chelles resta vacante pendant un temps assez long, et qu’elle était vacante lorsque le roi Robert, pour rétablir la discipline monastique, convoqua un concile dans son palais de Chelles en 1008.
Le révérend père Toussaint du Plessis a trouvé, en 1727, le nom de cette abbesse dans un cartulaire du monastère de Nanteuil le Haudoin, f°7, dans un titre copié textuellement au sujet d’une église ou chapelle de Saint-Samson située dans la paroisse de Baron, au diocèse de Senlis, que Mathilde, abbesse de Chelles, autorisée de toute sa communauté, donna en 1097 à l’abbaye de Cluny et que celle-ci la donna au prieuré de Nanteuil.
Mathilde serait de la maison des seigneurs de Coucy et, Toussaint du Plessis dans son histoire de l’église de Meaux la dit originaire de Nanteuil le Haudoin.
Le nécrologe de Saint-Denis fixe la mort de Mathilde Ière au 14 juillet 1112.
A partir de 1097 et jusqu’en 1792, l’abbaye fut dirigée par des abbesses élues, perpétuelles jusqu’à la réforme de 1504, puis triennales, enfin nommées par brevet royal à la suite du Concordat de Bologne (1516) entre François 1er et le pape Léon X.
(DOM PORCHERON, bibliothèque diocésaine de Meaux, TR 436.34. 326).
(BERTHAULT, l’abbaye de Chelles, résumés chronologiques)
(L’ABBÉ C.TORCHET, Histoire de l’abbaye royale Notre-Dame de Chelles)