Vingt-deuxième abbesse.
1220-1223.

Mathilde de Corbeil occupait la charge de trésorière depuis 1198 avant d’être élevée aux fonctions d’abbesse.
Elle était sœur du comte de Corbeil, de Pierre et Michel de Corbeil qui furent successivement archevêques de Sens, et grand-tante de Renaud ou Reginald de Corbeil, évêque de Paris.
Elle régla le différend que son abbaye avait avec le prieur de Gournay au sujet de la pêche dans la rivière de Marne.
Elle fit aussi régler le différend qu’elle avait avec les prétendus chanoines de Saint-Georges de Chelles. On prit pour arbitres Jacques, chanoine de Saint-Victor de Paris, le Pénitencier du Pape, le chapelain et le légat du Saint-Siège.
Les chanoines demandaient :
1- qu’on leur donnerait tous les jours pour cinq deniers de vin.
2- qu’en Carême et en Avent on leur donnerait de meilleur vin que dans les autres saisons de l’année.
3- que leurs portions seraient égales à celles des religieuses et qu’ils seraient traités comme le couvent aux funérailles des morts.
4- qu’ils seraient soulagés de la sujétion ou ils étaient de dire tous les jours la messe quoiqu’ils eussent déjà une semaine libre dans chaque mois.
5- que le nombre des chanoines qui avaient été autrefois de seize et qui était diminué soit rétabli.
6- que les terres de Noisy-en-Gâtinais et de Berne avec tous les arrérages dont ils n’ont pas eu la jouissance depuis plusieurs années leur soient restituées.
7- que les prébendes dont le revenu est à présent fort modique seraient augmentées conformément aux décrets du troisième concile de Latran.
8- qu’aux vêtures et aux professions ils seraient traités comme les religieuses.
9- que les bois de Montcharon qui sont dans la forêt de Livry leur seraient laissés pour leur chauffage.
10- qu’ils auraient voix à l’élection de l’abbesse.
11- Enfin qu’on les dédommageât des pertes que l’abbesse et les religieuses leur avaient causées en renversant un autel qu’ils avaient commencé de faire construire dans l’église Saint-Georges et une réparation des injures et des mépris qu’ils avaient reçus en cette occasion.
-L’abbesse et le couvent demandèrent que défenses fussent faites aux chapelains de prendre la qualité de chanoines mais seulement celle de clercs ou de chapelains.
-Qu’il leur fut ordonné d’être plus assidus à l’office divin, aux professions des fêtes solennelles et des dimanches et de ne s’en point dispenser sans des causes légitimes.
– Les juges arbitres prononcèrent sur les premier et second articles que la qualité et quantité de vin seraient égales en tous temps.
-sur le troisième les clercs furent déboutés de leur demande.
– sur le quatrième que les clercs diraient tous les jours la messe et que dans chaque mois ils auraient une semaine libre selon l’usage ordinaire.
– sur les cinquième et sixième il fut réglé qu’à l’avenir il n’y aurait plus que six clercs, qu’ils ne seraient plus appelés chanoines mais chapelains et qu’ils seraient tous prêtres pourvus chacun d’une chapelle à mesure qu’elles viendraient à vaquer savoir les chapelles de Saint-Jacques, de Saint-Barthélemy, de Saint-Laurent, de Saint-Denis, de Saint-Thomas, et de Sainte-Madeleine. Que l’on partagera tous les revenus tant des chapelles que ce qu’on a coutume de leur donner en sorte qu’ils puissent avoir chacun quinze livres par an , que s’il arrivait que le revenu des chapelles vint à augmenter , l’abbesse aurait le pouvoir d’augmenter le nombre des prêtres à proportion.
– sur le septième il leur fut défendu de jamais troubler le monastère dans sa jouissance des terres de Noisy et Berne. Que les chapelains n’auraient point d’autre sceau que celui de l’abbaye comme il s’était toujours pratiqué. Qu’ils n’entreraient point dans l’église de Saint-Georges et dans celle de Sainte-Bathilde durant l’office divin qu’avec leurs chappes fourrées de peaux.
– sur le huitième qu’aux festins qui se feraient aux vêtures et aux professions des religieuses ils seraient traités comme le couvent.
– sur les neuvième et dixième on impose silence aux chapelains et ils furent déboutés de leurs prétentions d’avoir voix aux chapitres pour les élections des abbesses.
Il fut enfin défendu aux chanoines d’enterrer aucun corps dans le cimetière de Saint-Georges, de bâtir aucun autel dans l’église ni de faire aucune procession extraordinaire sans la permission de l’abbesse, étant censés être comme domestiques du monastère. Il leur fut cependant permis de jouir de six arpents de terre du domaine de l’abbaye sans payer aucun cens à la seigneurie.
On attribue à cette abbesse la fin de la confection des quatre beaux cartulaires de l’abbaye et la dernière main aux règlements faits pour la nourriture des religieuses quoique commencé et en usage plusieurs années auparavant. Le père Martene remarque à l’occasion de ces statuts qu’on y assaisonnait les légumes avec de la graisse trois fois la semaine, les dimanches, les mardis, et les jeudis en quoi ajoute-t’il on était plus attentif à la règle à Chelles que dans d’autres couvents où on s’en servait tous les jours, en sorte que Pierre le Vénérable (Pierre était en 1223, chanoine de Champeaux et bailly de l’évêque de Paris) se crut obligé d’en interdire l’usage à cause du scandale des séculiers qui ne s’en servaient pas eux-mêmes les autres jours.
On lit encore dans ces règlements que pour les grandes fêtes on accordait de la viande aux religieuses mais que l’on en servait que d’une sorte, excepté le jour de la fête de Sainte-Bertille que les religieuses en avaient en deux mets et le jour de la Sainte-Bathilde en trois.
Mathilde de Corbeil mourut en 1223.
(DOM PORCHERON, bibliothèque diocésaine de Meaux, TR 436.34. 326).
(BERTHAULT, l’abbaye de Chelles, résumés chronologiques)
(L’ABBÉ C.TORCHET, Histoire de l’abbaye royale Notre-Dame de Chelles)